Mars – Prendre le temps

Le mois que j’attendais tant, le mois des vacances de printemps au Japon. L’année scolaire est finie, les étudiants abandonnent leur uniforme scolaire et les jeunes collégiennes revêtissent leurs jupes courtes avec leurs chaussettes montantes, très tendance au Japon.

Je me suis sentie très fatiguée ces dernières semaines, non pas que j’aime me plaindre, bien au contraire. J’ai été confrontée à des nombreux moments de stress et d’angoisse au travail et cela a affecté ma santé et mon corps. Rappel à moi-même, toujours me fier des premiers signaux que m’envoie mon petit corps et m’écouter en toute circonstance. Je me sens souvent coupable quand je m’arrête, quand je prends le temps de rester à la maison à ne rien faire, mais finalement je sais que c’est bénéfique, indispensable au bon fonctionnement de mon corps.

Cette société m’en demande souvent trop et m’oblige souvent à être au top, pourtant cela ne fait pas partie de mes priorités, je préfère vivre un peu plus lentement. Travailler au Japon est souvent épuisant, constamment sollicitée, j’ai la sensation de ne jamais vraiment déconnecter finalement.

Ces jours-ci je veux prendre le temps, prendre le temps de regarder autour de moi, de parler tranquillement avec les gens qui m’entourent, de profiter simplement des petits plaisirs que m’offre le Japon en mars. C’est la plus belle période de l’année au Japon selon moi, les cerisiers fleurissent et il est bon de profiter de ce beau spectacle que nous donne la nature. Les familles et amis se rassemblent sous les arbres, installent des bâches bleues prévues à cet effet et pique-niquent tout en admirant la beauté et la douceur des fleurs. Légendaire tradition printanière au pays du soleil levant, le hanami 花見(花fleur 見regarder, ou bien contempler les fleurs de cerisiers) a une large présence dans la culture nipponne. Une fois de plus on prend le temps, de boire du sake, de la bière, de manger des bentos, des mochis, de parler de la pluie et du beau temps, de regarder les enfants s’amuser avec les pétales rosées et on sourit, on rigole. Jusqu’à ce que les fleurs se détachent peu à peu de leurs branches et vêtissent le sol d’un parterre blanchâtre telle de la neige. Et là encore les photos vont bon train, on se souvient de ce hanami qu’on a fait avec ses amis, de ce printemps où les cerisiers avaient fleuri plus tôt que d’habitude, où il faisait plus chaud que les années précédentes. Puis les arbres se dénudent, redeviennent de vulgaires arbres et la vie reprend son court, les gens reprennent leur souffle, c’est comme si on mettait notre vie sur pause le temps de la floraison, pour admirer cet acte éphémère une fois par an, c’est comme si on s’autorisait enfin à prendre le temps, à se laisser flotter sur des nuages de pétales poudrées qui nous transportent vers un monde qui ne dure que quelques jours.